Conditions d’utilisations de mes photo par un éditeur

Bonjour,

J’ai reçu via flickr la demande d’un éditeur que voici :

Éditeurs à … nous préparons un livre illustré consacré à … Recherchant des images sur … pour compléter notre iconographie, notre attention a été attirée par ces clichés : liens vers 2 photos de ma galerie.

Nous serions peut-être intéressés par leur emploi dans notre livre. Nous autoriseriez-vous à les utiliser ?

Je ne sais pas trop comment réagir et voudrais savoir quelles sont les conditions habituelles de publications de photos dans un livre.

Je précise tout de suite qu’a priori je n’ai rien contre cette publication et que je ne cherche pas spécialement à gagner de l’argent (je ne crois pas que mes photos valent grand-chose ).

Il faut être très méfiant : si ce message ne précise pas lui-même les conditions et limites d'utilisation (voire de dédommagement), ce peut être un faux prétexte pour vous les piquer sans autre forme de procès. L'usage du pluriel dans "leur (emploi) " et "les (utiliser)" doit alerter sur le fait que cette demande ne semble pas désigner une photo particulière, et c'est alors louche.

Narbé, leur demande est très précise. Ils indiquent clairement 2 photos qui les intéressent (j'ai édité mon 1er message).

Qu'entends tu par "piquer" ? Les publier sans dire que ce sont les miennes ? Ne pas me payer ? Autre chose ?

Merci.

Bonjour,

si ils ne te proposent rien, demande leur le tirage prévu pour le livre et le format des photos afin de leur établir un devis.

Surtout ne pas se laisser avoir par le message, cela vous fera de la pub!

Henri

Il faut surtout en savoir plus sur le livre et sur l'utilisation des photos.

J'ai une petite expérience des contrats d'édition, tout est possible depuis le fait de considérer un photographe comme co-auteur du livre (dans ce cas il est rémunéré par un pourcentage du prix HT des livres vendus, comme l'écrivain) jusqu'à une rémunération fixe one-shot, ou pas de rémunération du tout.

Le nombre de tirages (du premier tirage) qui figurait obligatoirement dans les contrats d'édition (pour les écrivains) n'a plus de signification avec le passage généralisé de l'offset au numérique.

Moi je demanderais des précisions sur le livre et une proposition à l'éditeur, ce n'est pas possible de faire un devis sans avoir beaucoup d'éléments qui semblent manquer. Mais il ne faut pas rêver, même les vraies maisons d'édition sérieuses de petite taille sont fauchées, et en plus n'importe qui peut être éditeur (en général pour l'auto-édition, mais rien n'oblige à s'y limiter).

"Nous serions peut-être intéressés par leur emploi dans notre livre. Nous autoriseriez-vous à les utiliser ?"

Bien sûr qu'il faut être vigilant. Toutefois ici le conditionnel est employé, il s'agit à mon sens d'un premier contact pour un accord de principe avant d'aller plus loin dans la négociation ...

Merci à tous pour les informations qui m'ont permis d'y voir un peu plus clair.

Si ça vous intéresse, voilà où j'en suis. C'est une petite maison d'édition locale. Sérieuse, avec des ouvrages plutôt spécialisés. Le livre sera édité en 2000/2500 ex. et comportera env. 300 clichés en 14cm de large pour les photos paysage. Dont 1 ou 2 à moi. Pas de rémunération à part envoi d'un ex. du livre (c'est la moindre des choses, j'en voudrais 3 ). Les noms de tous les photographes sont crédités à la fin du livre. Et évidemment je reste propriétaire de mes photos. Je leur ai proposé de signer tous ça sur papier. Reste à espérer que ça se fait.

Juste un détail, rester propriétaire de ses photos ça ne veut pas dire grand chose.

En droit français, il faut distinguer le droit moral (en gros la paternité de l'oeuvre et ce qui en découle directement) qui est inaliénable (ne peut pas être cédé) et les droits patrimoniaux (en gros tout ce qui touche à l'utilisation de l'oeuvre).

A partir du moment où tu acceptes la publication de ta photo par un éditeur, cela signifie que tu lui accordes le droit d'exploiter ton oeuvre. Il conviendrait alors de clarifier un minimum par écrit sur les conditions: exclusivité ou pas de l'exploitation de l'oeuvre (clairement non-exclusivité puisque tu en restes "propriétaire", c'est donc une licence d'exploitation et pas une cession des droits d'exploitation ), modes d'exploitation autorisés (car les éditeurs sont susceptibles d'exploiter leur bouquin sous d'autres formes, par exemple la diffusion électronique, le multimedia,...), durée et étendue territoriale.

Voilà, licence d'exploitation (donc non exclusive), mode d'exploitation autorisé limité à l'édition principale (pas de droits multimedia ou de diffusion électronique, droits dérivés non cessibles ou transférables à un tiers), durée et étendue territoriale précisées, et tu peux espérer rester "propriétaire" de tes photos, si c'est important pour toi bien sûr.

En gros, des conditions qu'un éditeur refusera probablement, à toi de choisir entre la publication et la "propriété" de tes photos

Bonjour,

et encore une fois un photographe roulé dans la farine!

Ton éditeur te propose d'utiliser tes photos gracieusement,
- il fera apparaître ton nom: ce n'est pas un cadeau c'est obligatoire
- tu recevras un livre, peut-être mais 3 cela m'étonnerais

- il va utiliser tes photos pour leur qualité ou parce qu'elles sont gratuites.
En travaillant comme cela tu entres en compétition avec les photographes pro qui n'ont pas besoin d'une concurence déloyale pour subsister, que tu fournisses les photos, d'accord, mais au tarifs des pros barême UPC tirages 2500ex. photos 1/8 de page = environ de 100€

- - l'éditeur, le graphiste, l'auteur, etc sont rénumérés, pourquoi pas le photographe??

Je ne suis pas pro, mais quand quelqu'un a besoin de mes photos, il paye au tarif normal

Henri

+1 Diaph34 !

En particulier sur le principe de concurrence déloyale envers les professionnels.
Si l'ouvrage est vendu, alors, l'éditeur doit payer le contenu au prix du marché.
L'éditeur choisi les photos qu'il veut où il veut à qui il veut, mais qu'il paye .
Sinon, sa démarche consiste à détruire un métier pour se faire plus de bénéfice.

J'ai une vision plus darwinienne (sélection naturelle) de l'évolution des métiers.

Si un professionnel n'a pas une plus-value différenciatrice, qui lui permet de se démarquer de la concurrence en commençant par celle du "gratuit", et donc d'avoir ses clients, il est malheureusement sorti du jeu. Game over, faut passer à autre chose.

Et je ne vois aucune raison de faire culpabiliser n'importe quel photographe qui serait content d'avoir simplement ses photos publiées. La différence entre nous et un professionnel, c'est que nous faisons les photos d'abord pour notre plaisir, pas d'abord pour les vendre (enfin sauf parfois, pour ce qui me concerne), ça reste alors cohérent de les donner pour être publié.
Ne serait-ce d'ailleurs pas plutôt justement en les vendant qu'on ferait de la concurrence aux pros ?

Et le prix du marché pour une photo dans un bouquin ça n'existe pas, ça va du gratuit à un barême fixe quelconque (comme celui déjà cité) ou bien à quelques % du prix de vente HT (des exemplaires réellement vendus) en tant que co-auteur, voire 8-12% ou plus en tant qu'auteur unique.

Surfing a écrit:Et le prix du marché pour une photo dans un bouquin ça n'existe pas, ça va du gratuit à un barême fixe quelconque (comme celui déjà cité) ou bien à quelques % du prix de vente HT (des exemplaires réellement vendus) en tant que co-auteur, voire 8-12% ou plus en tant qu'auteur unique.

Bonsoir,

que fais tu alors des tarifs UPC et SOFAM ??

Henri

Surfing a écrit:J'ai une vision plus darwinienne (sélection naturelle) de l'évolution des métiers.

Certains appellent cela "l'ultra-libéralisme". On est pour... ou pas...

Certains se foutent qu'il y ai près de 4 millions de chômeurs. Ou pas...

Vaste débat...

Merci à Surfing pour la précision des infos fournies.

Diaph34 et narbé, vos réponses font réfléchir. Voici quelques détails concernant cette éventuelle publication.
Photo 1 : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Photo 2 : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Editeur : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Le livre s’appellerait « La nature en Corse ».
Un livre déjà paru dans la même collection : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

Je ne me sens absolument pas « roulé dans la farine ». Je fais des photos parce que j’aime bien ça. La publication, je m’en fiche éperdument. Tout comme de la possibilité de gagner de l’argent avec. Le jour où je ferai des photos qui me distingueront de l’énorme masse des photographes de dimanche, je changerai peut être d’avis, mais j’ai bien peur que ce ne soit pas pour demain

Concernant cette occasion, il se trouve que j’aime beaucoup la nature Corse et que l’éditeur a dans son catalogue pas mal de bouquins dont le sujet m’intéresse et qui parlent des coins où j’ai quelques attaches. Cela me suffit pour accepter d’être publié dans les conditions déjà décrites.

Concurrence avec les pros ? Si les pros ne font que des photos comme les miennes, tant pis pour eux Sinon, sérieusement, le numérique a changé beaucoup de métiers dont celui de photographe. C’est peut être malheureux, la rapidité des changements est dramatique, mais ce qui est sûr, c’est qu’on ne reviendra pas en arrière. Dernière chose, si on pousse ce raisonnement jusqu’au bout, tout travaille bénévole devient concurrence déloyale et cause de chômage. Je crois que c’est un peu plus complexe que ça...

kpere a écrit:Si les pros ne font que des photos comme les miennes, tant pis pour eux Smile

Néanmoins, en dehors de cet exemple précis, je rejoint Narbé sur l'ultralibéralisme qui pousse notre société vers un futur bien sombre...
Comment consommer sans mettre en danger l'humain derrière nos achats ? Un simple jeans devient une arme lourde (cf l'actu au Bangladesh ) :-/

Dans le rapport photographes amateurs/pro, j'ai "connu" un photographe-pro qui a mit fin à ses jours en laissant une lettre posthume assez éloquente sur son travail et l'amour qu'il lui portait. Un cri du cœur sur les difficultés nouvelles nées de la "démocratisation" de la photographie, de l'attitude des éditeurs/patrons de presse envers les droits à l'image et les tarifs, sans cesse tirés vers le bas par l'apparition sur le marché d'amateurs qui proposent des tarifs hallucinant pour des shooting de mariage, de mode ou de sport, allant même jusqu’à la gratuité pour voir ses images imprimées et flatter leur égo.

Il en est de même dans beaucoup de domaines, dans la musique que je côtoie, certains jeunes groupes se produisent gratuitement dans des clubs où les cachets étaient, il y a encore peu, suffisant pour faire vivre des musiciens-pro. Ce n'est hélas plus le cas aujourd'hui et la qualité des prestations s'en ressent. (et celle de la clientèle aussi ^_^)

Peut-être qu'un jour cela changera, mais si le consommateur final n'est pas plus conscient des implications qu'entraine ses exigences de tarifs toujours plus bas, j'en doute... Mais comment faire avec un pouvoir d'achat en berne, c'est pareil pour la nourriture et tous les biens de consommation !!

Si demain je trouve un 31 LTD f1.8 à 150€, il sera surement fabriqué par des enfants dans des conditions déplorables, saurais-je faire une recherche sur ses conditions de fabrication et résister à la tentation ???

narbé a écrit:

Surfing a écrit:J'ai une vision plus darwinienne (sélection naturelle) de l'évolution des métiers.

Certains appellent cela "l'ultra-libéralisme". On est pour... ou pas...

Certains se foutent qu'il y ai près de 4 millions de chômeurs. Ou pas...

On dérive là sur des connotations politiques qui n'ont rien à voir, aucun rapport avec le libéralisme, ultra ou pas, ni avec le chômage.

Il y a eu de tout temps et sous toutes les organisations politiques des métiers qui ont disparu et d'autres qui sont apparus. Lorsqu'un métier ne correspond plus à un besoin, ou n'est plus pertinent économiquement, il disparaît. Moine copiste c'était un beau métier, mais ça n'a pas résisté à l'imprimerie, et cet exemple porte bien à la fois sur la satisfaction d'un besoin et sur la pertinence d'un modèle économique.

Ce n'est d'ailleurs pas la technologie de photo numérique seule qui condamne certains photographes pros qui n'ont pas la capacité de se différencier, et donc de faire payer leur valeur ajoutée différenciatrice (qui peut être dans la photo elle-même ou dans un service global à un client) mais tout autant l'évolution des moyens de publication des photos.

Mon avis c'est qu'on s'épuise sans avancer en ramant contre le courant, il vaut mieux d'abord comprendre où est le courant principal (et accepter ce sur quoi on n'a aucune influence possible). Ensuite soit on suit le courant principal comme la plupart, soit on profite de tous les petits contre-courants locaux qui permettent aussi d'avancer.

Surfing a écrit:ni avec le chômage.

Quand on profite de ses loisirs pour effectuer ce qui pourrait constituer le travail d'un autre, si, on participe aux déficits d'emplois.

kpere, il ne faut pas se leurrer : un exemplaire du livre offert est une gratification suffisante pour tes deux photos dont l'intérêt n'est que documentaire.
Ces photos correspondent par hasard aux besoins d'un éditeur, et je doute qu'il enverrait un pro les refaire si tu les lui refusais.
Ce serait différent s'il te reconnaissait une expertise particulière en tant que "local qui fait de bonnes photos", et te demandait un reportage adapté à publication sur des beaux coins précis.
C'est que les photos de vacances sont faciles à trouver sur le net, mais avec la famille en avant-plan...

Pour ce qui est du débat, Surfing a mille fois raison.
En plus, le droit au travail est une curieuse notion très "lutte des classes" qui commence à dater.
Vive le droit de ne rien faire !

narbé a écrit:

Surfing a écrit:ni avec le chômage.

Quand on profite de ses loisirs pour effectuer ce qui pourrait constituer le travail d'un autre, si, on participe aux déficits d'emplois.

Tu viens de me donner un argument imparable pour que je refuse de garder mes petits-enfants quand je n'en ai pas envie